Roger CABLAT (13 juillet 2019)


Nous avons le regret de vous faire part du décès du lieutenant-colonel Terre/infanterie Roger CABLAT, le samedi 13 juillet 2019 à l’âge de 98 ans.

Roger était depuis 2015 en maison de retraite médicalisée à Vendargues. Il était veuf.

Ses obsèques ont été célébrées au complexe funéraire de Grammont à Montpellier le 18 juillet.


Hommage au lieutenant-colonel Roger CABLAT

à Grammont (Montpellier) le 18 juillet 2019

par ses deux enfants Christiane et Thierry

 

Roger est né le 11 juin 1921 à Popian (Hérault), dans une famille très modeste de viticulteurs. Sa carrière semblait toute tracée. Il devait devenir un homme de la terre. Les évènements en ont décidé autrement.

Au cours de la deuxième guerre mondiale, il s’est engagé dans les combattants volontaires et a servi au 1er Bataillon de l’Organisation de Résistance Armée du Tarn et, à ce titre, a participé aux opérations de libération de ce département et aux combats d’Autun du 8 au 10 septembre 1944. Avec ce régiment, incorporé dans la 1ère Armée Française, il a participé en temps que chef de groupe aux combats de Tholy et Cornimont (Vosges).

Le 27 novembre 1944, il est affecté à l’École Militaire Interarmes de Cherchell en qualité d’élève-officier d’active de la promotion "Rhin Français".

Il sert dans l’infanterie, il effectue deux séjours en Indochine entre décembre 1949 et 1954 entrecoupés d’une affectation à Aix-en-Provence où avec Paulette son épouse, ils donnèrent le jour à leur fille Christiane. En Indochine, il fut décoré de l’ordre royal du Cambodge, citation qui trouve son origine dans l’action de libération d’un poste isolé sauvant ainsi la vie de 70 hommes.

Puis le Maroc de décembre 54 à décembre 55, suivi de l’Allemagne jusqu’en septembre 1958.

Son fils, Thierry, conçu au Maroc, mais trouvant qu’il faisait trop chaud dans ce beau pays, préféra trouver  le jour dans le pays de Goethe, en Forêt noire.

Septembre 1958 jusqu’en mars 1961 c’est l’Algérie.

Le 1er septembre 1962, il arrive à l’École d’application de l’infanterie de Montpellier et y demeure jusqu’en septembre 1966. Pendant cette période, il est nommé chevalier de la Légion d’honneur en 1963.

Puis il est nommé commandant d’armes de la place de Béziers de 1966 jusqu’en 1971.

Le décès de son épouse Paulette en 1970, avec des enfants encore jeunes, a motivé sa décision de mettre fin à sa carrière militaire.

Il s’est mis au service de l’Union régionale des associations familiales avec sa fibre chrétienne et à celui de sa commune Lattes en étant élu comme conseiller municipal avec ses convictions de citoyen.

Parallèlement, il donna libre cours à sa passion pour l’histoire en créant l’association "Histoire Information". Dans ce cadre il parcourt l’ensemble de la France pour faire des diaporamas, support de ses conférences et recueils historiques.

Fidèle ami et soutien d’Henri Prades, il œuvra dans le projet de création du musée de  Lattes.

Ensuite les vicissitudes de l’âge ont, à son plus grand regret, mis un terme à ses engagements et passions.

Pour cette vie bien remplie et l’affection que tu nous as portée, nous te disons merci. Repose en paix.

 


 

Témoignage de son ami Jean-Noël

 

Ses enfants viennent de nous faire parcourir la carrière militaire et les engagements sociaux et humains de leur père.

Je voudrais juste vous dire un mot sur l’homme, sur Roger, sur ce jeune garçon de Saint-Bauzille de la Sylve, dont cette soif, presque instinctive d’apprendre, de chercher le pourquoi des choses, de vouloir l’expliquer, a été vite repérée  par le curé de son village.

Oui, ce brave prêtre avait compris qu’il y avait du potentiel chez ce jeune homme. Peut-être se disait-il en lui-même qu’il ferait un bon séminariste, et pourquoi pas, un jour, un évêque ?

Cela aurait pu arriver, les évènements et la guerre en ont décidé autrement.

Quoi qu’il en soit, Roger va trouver dans ces premières années heureuses de son existence, deux éléments essentiels qui vont conduire toute sa vie :

D’abord, la foi, ou du moins, l’existence de quelque chose qui nous dépasse et qui nous pousse à aller au-delà de notre propre intérêt, à avoir le souci de l’autre.

Ensuite « l’Amour de son Pays », l’amour de son village, l’amour de sa région, l’envie de faire connaître sa contrée à un grand nombre de personnes.

Ce faisant, il trouvait là, tout simplement, son équilibre. En effet, pour être bien dans sa peau, pour être un homme d’honneur, pour pouvoir donner l’exemple, il faut être bien ancré dans certaines valeurs.

Certes, il en a vu du pays ce jeune Languedocien : l’Indochine, l’Allemagne, l’Algérie  et j’en oublie sans doute... Mais dans son cœur, un seul endroit avait de l’importance, ce petit coin de l’Hérault, qui l’a vu naître. La preuve, c’est que même encore, ces derniers temps, alors qu’il ne bougeait plus guère, si Christiane et Thierry voulaient lui faire plaisir, ils lui disaient : "Papa on va aller faire un tour à Saint-Bauzille". Il était toujours partant.

Pour son pays, pour la France, à 20 ans, il n’a pas hésité à s’engager. La liberté, l’honneur de la patrie, c’était pour lui des réalités qui valent la peine que l’on donne une partie de sa vie.

Sa région, le fameux canal Philippe Lamour, tout ce qui a bâti notre Midi, des croisades des Albigeois jusqu’à l’avènement du découpage voulu par le  général de Gaulle, tout cela,  pour mieux le faire connaître, il s’est fait photographe, il s’est fait conférencier, il est devenu historien.

La Foi, je suppose qu’elle l’a souvent soutenu, aidé, motivé, dans ces moments effroyables et un peu irréels de la campagne d’Indochine, dans ces nuits de solitude où ce jeune officier loin de ses parents ou dans cette période pénible où, par suite du décès de l’être cher, on se retrouve tout seul pour élever ses enfants.

Cette foi, elle a été personnelle et intérieure dans ces prières récitées dans l’intimité du soir. Cette foi, elle a été partagée et mise au grand jour lorsque dans les années 60, en poste en Algérie il rencontre un jeune appelé du contingent qui fait de l’alphabétisation auprès des femmes et des enfants du lieu où est implanté la garnison. Cet homme, c’était Jacques Barrot. Avec lui il va rejoindre les idées du parti du Centre des Démocrates Chrétiens. Avec lui il va défendre au sein de la société civile les valeurs véhiculées par l’Église : la liberté, le respect de l’être humain, les droits de l’homme, la fraternité, l’aide aux plus  démunis. Malgré l’importance des différentes responsabilités ministérielles qu’occupa par la suite Jacques Barrot, cette amitié ne s’est jamais démentie

Cette foi, elle a été pour lui une source de réflexion et d’interrogation. Jean-Noël, me disait-il « Comment expliquez-vous que des hommes qui croient à un être qui les poussent à faire le bien, même s’ils n’adorent pas le même Dieu, n’arrivent pas à s’entendre ? »

Nous avions un projet que nous n’avons pas pu, malheureusement, concrétiser. Il voulait que nous allions tous les deux faire un pèlerinage à Taizé, dans cette communauté qui reçoit des gens de toutes confessions chrétiennes et qui les amène à prier en commun.

Aujourd’hui, Roger se présente devant le Père, il va sans doute lui poser toutes les questions qu’il évoquait sur « l'humanisme et la croyance religieuse ». Mais, surtout, il va lui indiquer qu’il connait sur terre un petit coin de paradis, qui est, certes, moins grand que le Ciel, mais, sans doute, presque aussi merveilleux, il s’appelle : Saint-Bauzille de la Sylve.